Détention

Aperçu des positions du CCR concernant la détention

La liberté est un droit fondamental qui ne peut être retiré que dans des circonstances limitées et prescrites par la loi. Comme l’affirment les Principes directeurs du HCR sur la détention, la détention des demandeurs d’asile doit normalement être évitée.

La détention en vertu de la législation sur l’immigration ne devrait donc être utilisée qu’en dernier recours et après avoir exploré les alternatives à la détention.

Le CCR estime que le droit à la liberté des non-citoyens est régulièrement violé au Canada en raison de l’utilisation généralisée de la détention. Il doit y avoir moins de détention et, lorsque des personnes sont détenues, elles doivent l’être pour la période la plus courte possible et dans les conditions les plus humaines et les moins carcérales.

La détention liée à l’immigration au Canada a un impact profond sur la dignité des personnes et entraîne des coûts humains énormes. De nombreuses personnes détenues souffrent de détresse aiguë et peuvent continuer à être traumatisées par cette expérience des années plus tard. La santé mentale des personnes se détériore pendant leur détention. Les effets de la détention sont particulièrement ressentis par les enfants et les personnes vulnérables, notamment celles qui ont été détenues dans un contexte de persécution, et celles qui ont des problèmes de santé mentale. La détention a des répercussions non seulement sur les personnes détenues, mais aussi sur les membres de la famille et les autres proches de la personne détenue.

En violation du droit international, la législation canadienne sur l’immigration mène à la détention arbitraire. Dans le cas d’une détention en raison de l’identité ou d’une inadmissibilité soupçonnée, le tribunal indépendant chargé du contrôle de la détention ne peut, en vertu de la législation, examiner la validité juridique de la décision de détention. Les dispositions relatives à la détention obligatoire des « étrangers désignés » sont clairement en violation de la Charte canadienne des droits et libertés.

Le racisme systémique signifie que les personnes racisées, en particulier les Noirs, sont plus susceptibles d’être détenues et, lorsqu’elles sont libérées, d’être soumises à des conditions de libération plus sévères que les autres.

Afin de protéger le droit à la liberté et de minimiser les effets néfastes de la détention, le CCR plaide pour les mesures suivantes :

  1. Modifier la loi afin de mettre fin à la détention arbitraire (les décisions non révisables de détention sur la base de l’identité ou d’une inadmissibilité soupçonnée, et les dispositions relatives aux « étrangers désignés »).
  2. Mettre fin à la détention des enfants en vertu de la loi sur l’immigration et préserver le droit de l’enfant à l’unité familiale en évitant la détention d’un parent ou d’un tuteur (légal ou de fait) qui accompagne un mineur.
  3. Introduire un mécanisme de surveillance indépendant pour l’ASFC afin de répondre au risque d’abus de pouvoir de la part de l’ASFC.
  4. Assurer une prise de décision cohérente sur la détention et les conditions de libération, en tenant compte des vulnérabilités particulières et du besoin de transparence.
  5. Étendre le recours aux alternatives à la détention. Les alternatives à la détention ne doivent pas mener à des mesures d’application plus rigoureuses envers des personnes qui autrement ne seraient pas placées en détention ni prolonger les mesures d’application de la loi envers des personnes qui autrement seraient libérées. Les alternatives ne doivent pas être reproduites à partir des modèles établis pour les criminels.
  6. Plutôt que de recourir à la détention et à d’autres mesures de contrôle, chercher à garantir le respect des règles d’immigration en fournissant un soutien complet au dossier de chaque personne, notamment en offrant aux personnes des renseignements pertinents et en leur proposant toutes les options.
  7. Assurer l’accès à la représentation juridique de bonne qualité (par exemple, par des avocats de garde).

Pour les personnes détenues, les conditions de détention doivent être radicalement améliorées :

  1. Réduire au minimum les éléments de type carcéral
  2. Éviter la détention dans les prisons provinciales (où les personnes sont soumises aux règles de la prison).
  3. Limiter strictement l’utilisation de moyens de contrainte (menottes et chaînes).
  4. Améliorer l’accès des personnes en détention aux ONG, aux services, aux visites, à l’internet, aux appels téléphoniques, etc.
  5. Améliorer l’accès des personnes en détention aux soins de santé mentale et physique.

Pour des informations supplémentaires: https://ccrweb.ca/fr/detention

Issues

Immigration, détention et enfants : Deux ans après, des droits toujours ignorés

Résumé

En novembre 2017, le gouvernement canadien a publié des instructions destinées à drastiquement limiter la détention des enfants.

Deux ans après, des enfants continuent de se retrouver dans les centres de détention d’immigration ou séparés de leurs parents à cause de la détention de ces derniers. Cela arrive régulièrement et non pas uniquement « dans des circonstances extrêmement limitées. »

Alternatives à la détention – cadre de principes

  1. La liberté est un droit fondamental. Personne ne devrait être détenu à moins d’une absolue nécessité. Selon les lignes directrices du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, la détention ne devrait constituer qu’une mesure de dernier ressort et, dans la plupart des cas, ne devrait pas être appliquée aux demandeurs d’asile.[1] Il faut donc adopter des dispositions nécessaires pour éviter toute détention inutile, notamment :
  1. La promotion d’une meilleure cohérence concernant les décisions en matière de détention, tout en évitant les décisions arbitraires
  2. L’adoption d’une politique claire contre la détention des enfants (tout en préservant le regroupement familial)
  3. La garantie de l’accès à la représentation juridique adéquate (par exemple par l’intermédiaire des avocats de garde)
  4. L’assurance de pouvoir communiquer avec les organisations non gouvernementales
  5. L’utilisation de stratégies d’évaluation du cas afin de réduire le recours à la détention et pour tenir compte des vulnérabilités particulières ainsi que de la nécessité de la transparence
  6. Une plus grande offre de possibilités de se présenter ou communiquer.
  7. La mise en place d’un système de rétroactions pour le suivi des détentions inappropriées
  1. Les alternatives à la détention ne doivent pas mener à des mesures d’application plus rigoureuses envers des personnes qui autrement ne seraient pas placées en détention.
  2. Les alternatives à la détention ne doivent pas prolonger les mesures d’application envers des personnes qui autrement seraient libérées.
  3. Les alternatives ne doivent pas être reproduites à partir des modèles établis pour les criminels
  4. La manière la plus efficace de veiller à la conformité aux règles de l’immigration consiste à assurer un soutien complet au dossier de chaque personne, notamment en fournissant aux personnes des renseignements pertinents et en leur proposant divers choix. Le soutien doit également comprendre un bon accès à la représentation juridique.
  5. Les alternatives doivent toutes refléter une compréhension claire et un respect du rôle des différents acteurs. L’application de la loi relève de l’Agence des services frontaliers du Canada. Le rôle des ONG consiste à offrir de l’aide et des services et non d’appliquer la loi.
 

[1] HCR, Principes directeurs relatifs aux critères et aux normes applicables à la détention des demandeurs d’asile et alternatives à la détention, 2012, disponible à http://www.refworld.org/docid/503489533b8.html

Issues

Le traitement des enfants non-citoyens au Canada

Résumé
Le Canada a signé la Convention relative aux droits de l’enfant de l’ONU, et s’est ainsi engagé à respecter les droits fondamentaux de l’enfant. Mais les droits des enfants qui ne sont pas citoyens canadiens ne sont pas toujours respectés. Ce document décrit comment le Canada peut s'améliorer. 8 pages, janvier 2012.

Conditions de détention - certificats de sécurité

Lettre au ministre de la sécurité publique

Le 30 janvier 2007

 

L’Honorable Stockwell Day
Ministre de la Sécurité publique
Chambre des Communes
Ottawa, ON, K1A 0A6

Monsieur le Ministre,

            Je vous écris au nom du Conseil canadien pour les réfugiés afin de solliciter votre attention urgente sur les conditions de détention de trois personnes détenues en vertu de certificats de sécurité au Centre de surveillance de l’Immigration de Kingston.

            Fort de son mandat de promotion des droits des réfugiés et des immigrants au Canada, le Conseil canadien pour les réfugiés exprime depuis longtemps ses inquiétudes en ce qui a trait aux certificats de sécurité, qui sont à notre avis fondamentalement injustes, notamment à cause d’un recours à des preuves non divulguées. Le fait que ce procédé implique une déportation éventuelle vers un danger de torture ne fait qu’accroître notre préoccupation envers ce processus déficient. En outre, les règles relatives à la détention des personnes en vertu d’un certificat de sécurité, y compris la détention obligatoire dans le cas des individus n’ayant pas la  résidence permanente, impliquent également la violation de droits fondamentaux. Il est très inquiétant que Mohammad Mahjoub, Mahmoud Jaballah et Hassan Almrei aient tous trois été détenus depuis plus de cinq ans, malgré le fait qu’ils n’aient pas été formellement accusés d’un crime. Nous continuons à recommander à votre gouvernement d’éliminer ou, du moins, de réformer le processus de certificats de sécurité afin de respecter les principes de justice fondamentale.

            En attendant, nous vous demandons d’améliorer, sans délai, les conditions de détention des personnes au Centre de surveillance de l’Immigration de Kingston. Rien dans les lois actuelles ne demande que les personnes détenues en vertu de la loi sur l’immigration soient sujettes à un régime de détention particulier, quel qu’il soit : au contraire, en tant que personnes n’étant ni accusées ni reconnues coupables d’un crime, ces détenus ne devraient pas faire l’objet de contraintes excédant celles nécessaires à leur maintien en détention. Pour les personnes détenues pour des périodes exceptionnellement longues, comme c’est le cas des détenus en vertu de certificats de sécurité, il incombe au gouvernement d’atténuer les rigueurs de la détention – autant que cela est possible – par le biais d’une amélioration des conditions de détention.

            Dans ce contexte, nous sommes choqués par les rapports sur les conditions de détention des détenus du Centre de surveillance de l’Immigration de Kingston, plus particulièrement en ce qui a trait à leur santé et à leurs besoins médicaux, qui sont gravement négligés. Nous observons que nombre des demandes exprimées par ces détenus pourraient être satisfaites sans coût ou inconvénient pour le gouvernement (par exemple, cesser le décompte des personnes dans une institution comptant seulement trois détenus, permettre aux détenus de porter leurs propres vêtements, leur permettre de faire des appels avec des cartes à frais modiques). Si ces questions sont insignifiantes du point de vue du gouvernement, elles ont cependant un impact énorme sur les détenus, comme le montre le fait que ces derniers aient entrepris une grève de la faim afin d’appuyer leurs demandes. Nous soulignons également que nous attendons du gouvernement canadien qu’il respecte la liberté d’expression et le rôle des médias dans une société démocratique en autorisant aux détenus un accès entier et libre aux médias.

            Nous nous joignons donc aux détenus et nombre d’autres organismes en vous demandant de répondre de manière immédiate et positive aux demandes de ces détenus, y compris par la désignation d’une tierce partie neutre qui assurerait une médiation continue entre les détenus et les responsables de l’administration du centre de surveillance.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma consideration respectueuse.

 

 

Elizabeth McWeeny
Présidente

cc.   L’honorable Diane Finley, Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration
Alain Jolicoeur, Président, Agence des services frontaliers du Canada