Mythe 1 : Les demandeurs d’asile sont des « resquilleurs ».
Faux. Il n’y a pas file d’attente pour les réfugiés. Le droit international garantit à toute personne fuyant la persécution le droit de se rendre dans un autre pays et de demander l’asile – c’est pourquoi nous avons un système de détermination du statut de réfugié.
Si votre vie est en danger, vous vous enfuyez. Vous ne restez pas sans bouger à attendre que de l’aide arrive. Des règles spécifiques s’appliquent aux réfugiés parce que leur vie est en jeu.
C’est suite à la deuxième guerre mondiale, période au cours de laquelle de nombreux pays, dont le Canada, ont fermé leurs portes aux réfugiés juifs, qu’ont été adoptées ces règles. Le Canada a récemment commémoré la tragédie du MS St Louis, dont de nombreux passagiers ont été tués par les Nazis suite au refus du Canada de le laisser aborder. Nous ne voulons pas revivre de tels évènements.
Mythe 2 : Les réfugiés doivent déposer leur demande d’asile dans le pays le plus proche ou le premier pays traversé.
Faux. Le droit international ne dit rien sur le lieu où les réfugiés doivent faire leur demande. Les réfugiés font ce qu’ils peuvent pour rejoindre un pays où ils seront en sécurité – et ce pays à l’obligation de protéger chaque réfugié présent sur son territoire.
Dans le cas des réfugiés sri-lankais, presque aucun pays de leur région n’a signé la Convention sur les réfugiés et la majorité d’entre eux n’offre que peu ou pas de protection à ces réfugiés. En Thaïlande par exemple, les réfugiés sri-lankais sont au mieux contraints à une vie précaire sans statut, s’ils ne sont pas arrêtés, détenus et même renvoyés au Sri Lanka. Rester en Thaïlande n’est pas une solution.
Étant donné que le Canada est éloigné des pays dont les réfugiés sont originaires, ils ne sont finalement qu’un petit nombre à arriver jusqu’ici. Il serait donc injuste de suggérer que, même ce petit nombre ne puisse entrer, mais doive plutôt se rendre dans d’autres pays, pays qui accueillent déjà beaucoup plus de réfugiés que le Canada.
Mythe 3 : Les personnes qui utilisent des passeurs sont moins susceptibles d’être des réfugiés ayant besoin d’une protection.
Faux. Les personnes fuyant la persécution n’ont souvent pas d’autre choix que de se tourner vers un passeur pour fuir. Que feriez-vous si votre vie était menacée et que vous deviez vous échapper?
Les moyens utilisés par ces personnes pour arriver au Canada ne nous expliquent pas les raisons qui les ont contraintes à fuir leur pays. Pour décider si elles ont besoin de notre protection nous devons savoir pourquoi elles ont fui et à quels dangers elles seraient exposées en cas de retour. Nous avons un système de détermination du statut de réfugié pour l’établir.
De nombreux réfugiés, peut-être même la majorité, utilisent des passeurs pour arriver au Canada. Ceci est d’autant vrai s’ils arrivent par avion, par bateau ou par voie de terre. On parle beaucoup du fait que les passagers du MV Sun Sea ont payé des passeurs. Mais ce n’est pas uniquement le cas des personnes arrivant par bateau. Pourquoi donc cette fixation sur le bateau?
Mythe 4 : Les passeurs ciblent de plus en plus le Canada.
Où sont les preuves? Les réfugiés utilisent les passeurs pour arriver au Canada, cela n’a rien de nouveau.
En fait, le nombre de demandeurs d’asile qui sont arrivés au Canada a baissé de façon dramatique (10 000 de moins entre 2009 et 2010).
Mythe 5 : Des politiques sévères freineront les passeurs et l’arrivée de demandeurs d’asile par bateau.
C’est injuste et immoral de punir les réfugiés pour décourager les passeurs. C’est par ailleurs inefficace. Les réfugiés fuient des situations désespérées et ils feront tout ce qui est nécessaire pour sauver leur vie. Ils sont rarement informés des politiques en vigueur dans le pays où ils arrivent, et parfois ne connaissent même pas leur destination.
L’Australie a mis en place des mesures punitives dans le but de décourager l’arrivée des réfugiés : cela n’a pas marché. En 2008, le gouvernement australien a mis fin aux « Visas de protection temporaires », expliquant que ceux-ci n’avaient pas atteint l’objectif : « Les preuves montrent que le “VPT ” n’a eu aucun effet de dissuasion. En effet, le nombre de femmes et d’enfants effectuant des traversées dangereuses a augmenté. » [1]
Le « Visa de protection temporaire » est presque exactement ce qui est prévu dans le projet de loi C-49. Pourquoi adopter une politique qui s’est déjà montrée inefficace ailleurs?
Mythe 6 : Nous devons nous méfier des réfugés sri-lankais qui sont arrivés par bateau, car ils pourraient être des terroristes ou des criminels.
Il n’y a aucune raison de penser que des malfaiteurs arrivent plus par bateau que par d’autres moyens de transport. Aucun terroriste averti ne se risquerait à une longue et pénible traversée par bateau, sachant qu’à son arrivée il fera l’objet d’un examen approfondi.
Le gouvernement a investi beaucoup de temps et de moyens pour enquêter sur les passagers du MV Sun Sea. Il n’est pas évident que cela soit rationnellement justifié. La détention à long terme et les enquêtes disproportionnées ont coûté au contribuable énormément d’argent.
Mythe 7 : Les Nations Unies ont affirmé que les Tamouls ne sont plus en danger au Sri Lanka.
Faux. En juillet 2010, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a publié de nouvelles directives reconnaissant l’évolution de la situation au Sri Lanka.[2] Le HCR estime que les Tamouls originaires du nord ne doivent plus être systématiquement présumés en danger, mais que chaque demande doit être examinée de manière individuelle. Il souligne que les groupes à risque au Sri Lanka incluent les journalistes, les défenseurs des droits humains, les lesbiennes, les gais, les bisexuels et les transgenres (LGBT) et les personnes soupçonnées d’avoir des liens avec le LTTE (Tigres tamouls).
Mythe 8 : Les Canadiens réclament des mesures répressives à l’encontre des personnes arrivant par bateau.
Les mesures répressives incluses dans le projet de loi C-49 ont été rejetées par l’ensemble des partis d’opposition et dénoncées comme illégales et punitives par un large éventail de groupes religieux, communautaires, syndicaux et de défense des droits.[3] Le gouvernement n’a procédé à aucune consultation préalable avant de présenter le texte et des groupes qui ont apporté leur soutien au projet ont par la suite affirmé ne pas appuyer l’intégralité du texte ou bien se sont avérés être des groupes peu représentatifs.[4]
De nombreux Canadiens souhaitent évidemment se montrer intransigeants envers les passeurs, mais la loi C-49 punit les réfugiés. Le Conseil canadien pour les réfugiés croit profondément que la majorité des Canadiens ne souhaitent pas voir les réfugiés, dont des enfants, emprisonnés comme punition pour avoir cherché l’asile.
Que se passe-t-il exactement?
L’arrivée de presque 500 réfugiés par bateau représente évidemment un défi logistique, mais ce n’est pas une crise. Les demandeurs d’asile arrivés par bateau ne représentent que 2 % du total des demandes déposées au Canada l’année dernière. Nous avons des lois en vigueur pour gérer ce genre de situation. Les détentions à long terme, notamment pour les mères avec enfants, ne se justifient pas.
Nous déplorons le développement au Canada d’un discours anti-réfugié, habituel dans de nombreux autres pays. En Australie et en Europe, des représentants politiques ont répandu des mythes sur les réfugiés et ont joué avec la peur des gens en exploitant leurs sentiments racistes et xénophobes, avec pour seul objectif de gagner des votes. Cette vision à court terme est destructrice pour une société. Pourquoi le Canada suivrait-il un exemple aussi négatif?
Le gouvernement a le devoir de défendre nos obligations légales envers les réfugiés et de promouvoir une politique positive d’accueil des réfugiés.
[4] Globe and Mail, “Human smuggling bill endorsements not all they seem”, le 7 novembre 2010, Heather Scoffield, http://bit.ly/bKdo1Y. (en anglais)