L’année 2013 était marquée par l’accroissement des vulnérabilités pour de nombreux réfugiés et immigrants au Canada, le statut étant souvent plus difficile à obtenir et plus facile à perdre. Les priorités économiques l’ont emporté sur la réunification familiale et la protection des réfugiés.
Nouveau système d’asile : délais serrés, un système à deux vitesses
L’année 2013 était la première année d’application du nouveau système de détermination du statut de réfugié. Alors que le nouveau système est rapide et équitable pour certains, ses délais courts et ses règles complexes entraînent de sérieux problèmes pour d’autres.
- Les délais courts génèrent un niveau important de stress. Nombreux sont les demandeurs qui se retrouvent incapables de se préparer convenablement pour leur audience. Les délais sont particulièrement dommageables pour les demandeurs vulnérables, tels que les personnes ayant survécu à la torture, ou les demandeurs qui fuient la persécution en raison de leur genre ou de leur orientation sexuelle.
- Système à deux vitesses : certains demandeurs ont un accès réduit à la protection à cause de leur pays d’origine. Les demandeurs d’asile des pays d’origine désignés ont encore moins de temps pour préparer leur cas, avec un accès aux services limité et des droits de recours restreints.
- Accès aux soins de santé : Des coupures au Programme fédéral de santé intérimaire en 2012 multiplient les difficultés rencontrées par les demandeurs dans le nouveau système.
- Le nombre de personnes présentant une demande d’asile au Canada a chuté de manière spectaculaire en 2013. Les chiffres définitifs pour l’année risquent d’être historiquement les plus bas.
Manque de protections avant l’expulsion
Le gouvernement a consacré davantage de ressources pour les expulsions rapides alors que de nouvelles règles suppriment les mesures de protection contre l’expulsion en cas de nouvelles preuves de risque ou de motifs importants d’ordre humanitaire. La loi fait des exceptions pour l’intérêt supérieur de l’enfant et pour une condition médicale potentiellement mortelle, mais la personne peut être expulsée avant que cela ne soit appliqué.
Travailleurs migrants : le statut temporaire les rend vulnérables aux pratiques abusives
Pays traditionnel de l’immigration permanente, le Canada s’est orienté radicalement vers la migration temporaire. Les travailleurs « peu qualifiés » entrant dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires du Canada, y compris de nombreuses femmes, sont vulnérables aux mauvais traitements, à l’exploitation et même à la traite.
- Les bulletins provinciaux et fédéraux du CCR sur les travailleuses et travailleurs migrants soulignent de graves lacunes dans la protection des droits fondamentaux des travailleurs au Canada. Heureusement quelques provinces adoptent des mesures comblant certaines de ces lacunes, mais il reste beaucoup à faire.
- Les changements dans la Catégorie de l’expérience canadienne rendent la situation encore plus difficile pour certains travailleurs temporaires qui aspirent à devenir résidents permanents au Canada.
Accès limité à la protection pour les personnes ayant subi la traite
Les nouvelles lois restrictives font souffrir les personnes ayant subi la traite au Canada, alors qu’elles essaient de s’échapper aux criminels qui les exploitent. Les permis de séjour temporaires ont été mis en place pour les protéger, mais ces permis ne sont plus disponibles pour les demandeurs d’asile. Certains trafiquants forcent leurs victimes à faire une demande d’asile. Citoyenneté et Immigration Canada reconnaît le problème et cherche une solution.
La résidence permanente : de moins en moins permanente
Les nouvelles règles d’immigration signifient qu’il est plus facile de perdre la résidence permanente dans de nombreux cas.
- La résidence permanente conditionnelle pour les conjoints parrainés. L’année 2013 fut la première année de l’application de cette nouvelle politique. Si un couple ne vit pas ensemble pendant une période de deux années, la personne parrainée perdra son statut et risque de se faire expulser. Des exceptions sont prévues dans les cas de mauvais traitements, mais la préoccupation demeure : cette politique rend les femmes encore plus vulnérables à la violence.
- Après avoir commis un crime : Les changements de 2013 signifient que de plus en plus de résidents permanents n’ont aucun moyen de faire appel de leur expulsion, même s’ils ont vécu pratiquement toute leur vie au Canada.
- Les réfugiés jugés n’avoir plus besoin de la protection. Aujourd’hui, les résidents permanents qui sont venus au Canada en tant que réfugiés perdent automatiquement leur statut si un tribunal juge qu’ils ne sont plus des réfugiés. Les personnes qui mènent une vie paisible et productive au Canada sont menacées d’expulsion.
En 2013 la Cour suprême a mis le Canada en conformité avec les normes internationales quant à l’exclusion de la protection offerte aux réfugiés sur la base de crimes de guerre.
Les réfugiés ne seront plus exclus de la protection au Canada en raison d’un simple soupçon de crimes ou de leur appartenance à un groupe ayant commis des crimes, sans être personnellement coupables.
Citoyenneté canadienne : plus difficile à obtenir, plus facile à perdre
Les questions de citoyenneté ont attiré l’attention en 2013, et feront de même en 2014.
- Obstacles dans l’acquisition de la citoyenneté. Les délais de traitement des demandes de citoyenneté dépassent actuellement 2 ans. En 2013 de nombreux demandeurs ont dû remplir un « questionnaire sur la résidence » détaillé, entraînant des délais supplémentaires. Depuis 2012 les demandeurs doivent fournir une preuve de leurs connaissances linguistiques (à leurs frais) - un obstacle, notamment pour les réfugiés vulnérables.
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Des propositions législatives pourraient rendre la perte de la citoyenneté plus facile, notamment pour les détenteurs de la double nationalité. Le gouvernement pourrait également retirer le droit d’obtention automatique de la citoyenneté par la naissance au Canada.
Les priorités économiques aux dépens des familles et des réfugiés
L’immigration canadienne comporte trois volets : l’immigration économique, la réunification des familles et la protection des réfugiés. En 2013 le premier volet a été hautement prioritaire. Les réfugiés et la catégorie de l’immigration familiale sont de plus en plus évalués selon des critères économiques.
- Retards importants pour les réfugiés parrainés par le secteur privé. Il faut 9 mois pour le traitement au Canada d’une demande de parrainage! Il faut ensuite en moyenne 37 mois pour le traitement de la demande du réfugié à l’étranger.
- Absence de réponse à la crise syrienne. Le Canada n’a pas ouvert ses portes aux réfugiés syriens, malgré l’ampleur sans précédent de la crise. Les délais de traitement signifient que les réfugiés syriens parrainés mettront des années à arriver, alors que le gouvernement ne s’est engagé à réinstaller que 200 réfugiés syriens.
- Fin du programme mondial de réinstallation. Dorénavant le Canada réinstallera des réfugiés en provenance d’un nombre limité de pays. Des facteurs économiques, dont la facilité d’adaptation à la vie au Canada, priment sur les besoins de protection. Le gouvernement cherche à limiter le nombre des réfugiés réinstallés ayant des besoins médicaux.
- Restreindre aux riches le parrainage des parents et des grands-parents. Des nouvelles règles, en vigueur à partir du 1er janvier 2014, augmentent le seuil de revenus requis pour parrainer des parents ou des grands-parents de 30% alors que la durée de parrainage est doublée - de 10 à 20 ans.
- Longs délais de traitement des enfants. Dans certaines régions, les enfants attendent plus de deux ans pour être réunis avec leurs parents au Canada.
Le CCR demande :
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