En réponse aux consultations nationales de Citoyenneté et Immigration Canada sur la planification des niveaux d’immigration pour le 2013, le CCR a identifié les préoccupations prioritaires suivantes :
Rééquilibrer les trois piliers
Le Canada devrait rééquilibrer les niveaux d’immigration afin d’établir une plus grande égalité entre les trois piliers, et ce, en priorisant à nouveau la réunification familiale et les réfugiés. La proportion de l’immigration globale accaparée par l’immigration économique a considérablement augmenté au cours des dernières années - passant de 55% en 2005 à 66% en 2010. Au cours de la même période, la réunification familiale est passée de 28% à 21.5% et sur une plus longue période, la réunification familiale a diminué drastiquement, passant de 43.9% de réussite en 1993, à 21.5% en 2010. Entre 2005 et 2010, le nombre de réfugiés a diminué de 14% à 9%. Il est important que le programme des réfugiés continue à être un programme humanitaire, donnant priorité aux besoins de protection et maintenant son emphase sur les réfugiés et leurs besoins médicaux, entre autres.
Augmentation du niveau de l’immigration afin qu’il atteigne 1% de la population
Les Canadiens, de nombreux acteurs privés et publics ainsi que le gouvernement fédéral, conviennent que le Canada a besoin d’immigrants pour maintenir sa prospérité actuelle, et il est largement admis que l’immigration a renforcé le tissu multiculturel et multi-religieux du Canada. Malgré le besoin d’immigrants afin de compenser pour les changements démographiques, le Canada tente de remplir une proportion considérable du besoin de main d’œuvre par le biais de la migration temporaire au lieu de l’immigration permanente. Dans le passé, il est arrivé que le Canada reçoive un nombre d’immigrants supérieur à 1 % de la population, et en est devenu plus fort en conséquence; toutefois, le niveau annuel actuel de l’immigration au nombre de 250,000 est bien au dessous de ce pourcentage. Le gouvernement canadien devrait établir un niveau d’immigration équivalent à au moins 1% de la population et investir les ressources nécessaires pour assurer un établissement et une intégration réussis.
Nos obligations en droit international doivent être respectées
La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés est explicite concernant son application de façon conforme aux obligations juridiques internationales du Canada. Ces obligations, qui concernent la protection des réfugiés et les droits des enfants, ne peuvent être reléguées au second plan) afin de satisfaire d’autres objectifs. La loi C-31, sanctionnée à la fin du mois de juin 2012, aura pour résultat la détention des enfants, la séparation des familles pour de longues années, et la détention arbitraire de certains demandeurs d’asile pour une période de 6 mois durant laquelle aucune révision indépendante ne sera faite. Elle contient aussi des échéanciers trop courts pour que les réfugiés se préparent adéquatement pour leurs audiences. Il est important que le gouvernement se prononce clairement et systématiquement à l’appui de nos obligations légales, afin d’éduquer le public canadien à leur sujet.
Réaffirmer l’objectif de « veiller à la réunification des familles »
L’importance donnée à la réunification familiale a été réduite au cours des dernières années. La catégorie de la réunification familialereprésente aujourd'hui une proportion beaucoup plus faible de l'immigration globale et a diminué en chiffres absolus. Au printemps dernier, le gouvernement a annoncé son intention de restructurer le programme d'immigration des parents et grands-parents en réduisant le nombre de candidats admis. D’autres obstacles et retards se multiplient, y compris pour les membres des familles des réfugiés. Le Canada devrait revenir à un plus grand engagement en faveur de la valeur de la famille et de l’impératif qu’est la réunification familiale rapide, surtout lorsqu’il s’agit d’enfants. La définition de la famille devrait être élargie afin de refléter les réalités des diverses communautés culturelles présentes au Canada et les obstacles à la réunification doivent être retirés en fournissant des ressources nécessaires pour traiter les demandes en temps opportun. D’autres obstacles inutiles doivent être éliminés : par exemple, de nombreux candidats sont confrontés à des demandes de tests ADN coûteux et longs à obtenir et ce, souvent des années après que leur demande ait été présentée, alors qu'il n'y ait aucune preuve qui mette en doute le lien familial. La suppression des obstacles à la réunificationfamiliale n'est pas seulement dans l'intérêt des familles elles-mêmes, mais aussi dans celui du pays dans son ensemble : des familles fortes et unies contribuent à créer une société canadienne forte.
Faire en sorte que les immigrants soient membres à part entière de la société
Auparavant, CIC avait mentionné que « le Canada joue un rôle de chef de file en accordant à ses nouveaux arrivants la gamme complète de droits et de responsabilités associés à la citoyenneté ». Il est important de maintenir cette tradition. Des tendances contraires ont cependant été observées dernièrement, comme l’augmentation du nombre de nouveaux arrivants admis en tant que travailleurs étrangers temporaires. Bien que ces nouveaux arrivants paient des impôts et contribuent à l'économie canadienne en remplissant des emplois qui ne sont souvent pas temporaires, ils ne bénéficient pas de la « gamme complète des droits », et sont donc soumis à l'exploitation et aux abus, tel qu’indiquent de nombreux cas documentés. Malheureusement, certaines propositions et lois récentes auront pour conséquence la création de nouvelles catégories de nouveaux arrivants dont les droits seraient limités de façon importante, y compris la proposition de « résidence permanente conditionnelle » pour les conjoints parrainés. Il est prévu que celle-ci soitmise en œuvre prochainement, ainsi que le projet de loi C-31, qui empêchera certains réfugiés de recevoir la résidence permanente au cours des cinq années suivant l’acceptation de leur demande d’asile. Le gouvernement devrait revenir à la politique canadienne traditionnelle d'accorder un statut permanent aux nouveaux arrivants.
L’égalité de traitement
Il est à craindre que le principe fondamental d'égalité de traitement pour toutes les personnes n’est pas actuellement respecté dans le programme d'immigration du Canada. Il ne devrait pas y avoir autant de variations dans les délais de traitement d’un bureau des visas à l’autre, ou d’une région à l’autre. Bien que ces disparités demeurent, il est intéressant de noter que les délais de traitement pour le parrainage privé des réfugiés au bureau des visas de Nairobi se sont récemment améliorés, ce qui est un signe très positif.
L’augmentation des niveaux de réfugiés parrainés par le secteur privé
Les Canadiens ont la capacité et la volonté de s’investir davantage afin d’offrir aux réfugiés un avenir qui soit sûr et permanent. Le parrainage privé est rentable car il offre un soutien aux réfugiés à partir des contributions des particuliers. L'engagement du gouvernement d’augmenter le niveau de parrainage privé des réfugiés, grâce à des initiatives mixtes et par la désignation faite par des bureaux des visas, est bienvenu. L'engagement du Canada vis-à-vis la réinstallation des réfugiés pris en charge par le gouvernement devrait toutefois être augmenté indépendamment du nombre de réfugiés dans le programme de parrainage privé.
Les enfants
Le programme d’immigration ne fonctionne pas pour les enfants à plusieurs égards. Les enfants doivent souvent attendre des années avant que le traitement de leur demande d'immigration s’achève et qu’ils soient réunis avec leurs parents. De plus, les enfants sont régulièrement maintenus en détention et ce, pendant des semaines voire des mois. Malgré cette situation pénible, aucun effort visant à accorder une priorité plus élevée aux questions relatives aux enfants n’est observé. Le Canada a des obligations légales et morales envers les enfants. Il faut accorder une attention urgente à la prise de mesures pour s’assurer que le programme d’immigration réponde efficacement aux besoins des enfants.
L’égalité des sexes
Le Canada a été un leader dans la promotion de l’égalité des sexes. La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés comprend une obligation de réalisation d’une étude basée sur le genre, concernant l’impact de cette loi. En considérant les niveaux d’immigration, nous devons accorder une attention particulière aux impacts différentiels selon le sexe, et prendre des décisions qui favorisent l’égalité entre les genres.
Les personnes apatrides
Les personnes apatridessont vulnérables parce qu’elles ne sont reconnues en tant que citoyennes d’aucun pays et conséquemment, ne sont pas protégées par aucun pays. Le Canada devrait signer la Convention relative au statut des apatrides de 1954 et amender la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés afin d’y inclure l’apatridie comme motif de protection. Il devrait prendre un engagement vis-à-vis la protection et la réinstallation des personnes apatrides.
La responsabilité du Canada d’intégrer les nouveaux arrivants
L’intégration est une voie à deux sens : la société canadienne et les nouveaux arrivants ont chacun des responsabilités. Certains nouveaux arrivants éprouvent des difficultés financières en raison d'obstacles systémiques auxquels ils se heurtent. Nous devons redoubler nos efforts afin dedémanteler ces barrières et d’allouer des ressources suffisantes pour l’établissement et l’intégration efficaces des nouveaux arrivants.
Promouvoir l’appui au programme d’immigration
La capacité de notre pays à maintenir et à accroître avec succès les niveaux d’immigration dépend en partie du niveau de soutien public. Le gouvernement, à son tour, joue un rôle de leadership important en s’assurant que les Canadiens appuient les programmes d’immigration, de protection et de réinstallation des réfugiés. Le gouvernement doit promouvoir les contributions positives des nouveaux arrivants et éviter les discours qui propagent de fausses idées et des préjugés à l’encontre des immigrants et des réfugiés.