Une vision pour un renforcement de la mise en application des droits humains internationaux au Canada

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Il y a presque 70 ans de cela, le Canada s’est joint à d’autres États pour adopter la Déclaration universelle des droits de l’homme, acceptant ainsi que « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». À l’intérieur d’un pays, la Déclaration ainsi que d’autres principes de droit international représentent un engagement de tous les paliers de gouvernement. C’est pour cette raison que cette réunion des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la protection des droits humains au Canada revêt une telle importance.

Au Canada, en dépit des progrès évidents réalisés en matière de droits de la personne depuis l’adoption de la Déclaration universelle il y a de cela 69 ans, plusieurs lacunes significatives et échecs flagrants persistent. Tout au long de ces années, ces lacunes ont été soulignées à maintes reprises lors des examens du dossier du Canada réalisés par différents comités de surveillance des traités, par des experts indépendants et d’autres gouvernements, ainsi que via plusieurs processus de protection des droits humains élaborés par les États dans le cadre des Nations Unies et du système interaméricain des droits de l’homme. D’importantes recommandations constructives pour des réformes ont été soumises au Canada. Cependant pour ce qui est de leur adoption et de la conformité aux obligations internationales en matière de droits humains, le dossier du Canada est au mieux inconsistant et au pire un échec complet. De façon répétée, les agences internationales ont demandé au Canada d’élaborer une meilleure approche.

À plusieurs reprises, des organisations de peuples autochtones ainsi que des groupes de la société civile ont réclamé un renforcement et une amélioration du système destiné à la mise en application des droits humains internationaux au Canada. Nous avons toujours souligné l’importance d’améliorer la défense de ces droits au pays et d’assumer également un rôle de leadership de premier plan dans un monde qui a désespérément besoin de pays disposés à respecter leurs obligations internationales.

À plusieurs reprises, nous avons exigé des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables des dossiers de droits humains qu’ils se réunissent, qu’ils s’engagent vers un objectif et qu’ils entament un processus de réforme. Nous reconnaissons que cette rencontre historique offre précisément cette opportunité. À défaut d’une action entreprise par vous, la coordination intergouvernementale requise pour faire en sorte que les obligations internationales du Canada en matière de droits humains soient mises en application de manière pertinente et appliquées de façon consistante, demeurera hors de portée.

Au nom de toutes les organisations représentées ici aujourd’hui et conscients que nous sommes du très grand nombre d’autres qui auraient accepté avec joie une invitation à participer à cette réunion tant espérée, nous proposons les recommandations suivantes relatives aux principes clé et aux actions concrètes auxquelles vous allez vous engager en acceptant de combler ce vide dans la mise en application des obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne.

1.            Reconnaître que vous êtes l’équipe de tête pour ce qui est de la mise en application des obligations internationales du Canada en matière de droits humains

  • Prendre la responsabilité d'assurer une approche pangouvernementale de la mise en œuvre internationale des droits de la personne.
  • Mettre sur pied un groupe intergouvernemental de travail au niveau des sous-ministres chargé d’élaborer un nouveau cadre législatif pour la mise en application des droits humains internationaux au Canada, en étroite consultation avec les organisations des peuples autochtones et des groupes de la société civile;
  • Décider de se rencontrer à nouveau en décembre 2018 pour marquer le 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et rendre compte des progrès réalisés en vue de l’établissement d’un nouveau modèle;
  • S’engager à se rencontrer régulièrement à l’avenir.

2.            Adhérer aux six principes suivants, qui sont au cœur d’un nouveau cadre d’application des droits humains internationaux au Canada, basé sur les droits de la personne

  • Reconnaître et respecter les droits des peuples autochtones en fonction de la Déclaration de l’ONU sur les droits de peuples autochtones;
  • Adopter une approche féministe et intersectionnelle relative au maintien des droits de la personne;
  • Appliquer la vision de l’impact de l’équité raciale et celle de l’inclusion basée sur le handicap au cadre de la mise en application par le Canada des droits humains internationaux;
  • S’engager en vue d’une égalité substantielle afin de combattre la discrimination et la marginalisation systémiques;
  • Combattre les recoupements entre le sexisme, le racisme, le capacitisme et les autres formes de discrimination;
  • Reconnaître que la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels est une condition préalable à la jouissance des droits civils et politiques, en particulier pour les groupes les plus défavorisés et que tous les droits humains, sont universels et interdépendants.

3.            Fournir aux groupes et aux institutions suivants, un réel et véritable rôle dans la mise en application des droits humains internationaux au Canada

  • Les organisations des peuples autochtones, incluant les organisations de femmes autochtones;
  • Les groupes de la société civile, notamment ceux travaillant directement auprès des communautés et groupes marginalisés et subordonnés;
  • Le Parlement et les assemblées législatives;
  • Les commissions et les tribunaux de droits humains de compétences fédérale, provinciales et territoriales.

4.            Faire en sorte que l’imputabilité et l’accès à la justice et à des recours efficaces soient caractéristiques de l’approche du Canada en matière d’application des droits humains internationaux, et ce à tous les niveaux de gouvernement

  • Le Canada doit reconnaître que l'accès à la justice et des recours efficaces sont essentiels pour tous les droits de la personne dont les droits économiques, sociaux et culturels;
  • En plus de ratifier les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits des personnes en situation de handicap et à la Convention contre la torture, le Canada devrait ratifier les procédures facultatives de traitement des plaintes relatives au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, à la Convention pour l’élimination de la discrimination raciale et à la Convention relative aux droits de l'enfant.
  • Amasser et publier les données ventilées selon le sexe et le genre, selon l’identité autochtone, raciale et ethnique, selon la déficience et les autres caractéristiques pertinentes, pour identifier, comprendre et combattre les patterns de violation des droits; 
  • Établir des mécanismes de coordination intergouvernementale à un niveau d’autorité qui permette une prise de décision responsable;
  • Rendre compte régulièrement et publiquement de la mise en application en fonction des échéances et de repères comparatifs;
  • Mettre sur pied un organisme de surveillance indépendant qui fasse rapport des progrès du Canada en route vers la conformité à ses obligations internationales en matière de droits humains.

 

Action Canada pour la santé et les droits sexuels

Alliance Féministe pour l’Action Internationale

Amnesty International Canada (English)

Amnistie internationale Canada francophone

Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés

Association des Avocats Noirs du Canada

Association canadienne pour l’intégration communautaire

British Columbia Aboriginal Network on Disability Society

Canada sans pauvreté 

Centre consultatif des relations juives et israéliennes. 

Centre de défense des droits sociaux

Chinese and Southeast Asian Legal Clinic

La Clinique Juridique Africaine Canadienne

Coalition canadienne pour les droits des enfants

Colour of Poverty - Colour of Change

Congrès des peuples autochtones

Conseil canadien pour les réfugiés

Conseil des Canadiens avec déficiences

Conseil national des musulmans canadiens

Egale

Les Femmes Michif Otipemisiwak

Femmes Autochtones du Québec

Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes

Ontario Council of Agencies Serving Immigrants

Réseau d’action des femmes handicapées du Canada

South Asian Legal Clinic of Ontario

 

[1] La Déclaration universelle des droits de l’homme a été adoptée le 10 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies.

[2] Empty Words and Double Standards: Canada’s Failure to Respect and Uphold International Human Rights, 2012, http://www.amnesty.ca/get-involved/lead-in-your-community/empty-words-and-double-standards-canadas-failure-to-respect-and-; Promise and Reality: Canada’s International Human Rights Implementation Gap, 2008, http://socialrightscura.ca/documents/UPR/JS1_CAN_UPR_S4_2009_SocialRightsAdvocacyCentre_Etal_JOINT.pdf.