Citoyenneté canadienne - modifications 2009

Les modifications apportées récemment à la Loi sur la citoyenneté entreront en vigueur le 17 avril 2009 et auront des conséquences importantes sur la transmission de la citoyenneté canadienne aux enfants. Ces modifications créent le risque que des enfants de citoyens canadiens soient apatrides.

Les modifications créent deux classes de citoyenneté, dont une classe inférieure qui n’a pas le droit de transmettre la citoyenneté canadienne à ses enfants (biologiques ou adoptifs).

Citoyens de première classe

Les citoyens canadiens qui sont :

  • nés au Canada, ou
  • des citoyens naturalisés (après avoir immigré au Canada)1

auront toujours le droit de transmettre leur citoyenneté à leurs enfants (c’est-à-dire que leurs enfants seront des citoyens canadiens même s’ils ne naissent pas au Canada).

Citoyens de seconde classe

Les citoyens canadiens qui sont :

  • nés à l’étranger d’un parent citoyen canadien,2 ou
  • les enfants adoptés à l’étranger par des citoyens canadiens, qui ont obtenu la citoyenneté selon les nouvelles dispositions d’attribution directe pour les enfants adoptifs (introduites en 2007)

n’auront pas le droit de transmettre leur citoyenneté à leurs enfants (c’est-à-dire que leurs enfants ne seront pas des citoyens canadiens s’ils ne naissent pas au Canada et leurs enfants adoptés à l’étranger n’auront pas droit à l’attribution directe de la citoyenneté).

Vous devriez vous en préoccuper si :

  • Vous croyez que tous les citoyens doivent être égaux en matière de droits et d’obligations, sans égard à la façon dont ils sont devenus citoyens.
  • Vous êtes contre l’apatridie et en particulier contre la possibilité que des enfants de citoyens canadiens soient apatrides.
  • Vous, votre famille ou vos amis pourraient être directement touchés.

Ci-après, quelques cas de figure pour illustrer les conséquences de ces modifications :

  • Les parents de Maria sont des Canadiens qui vivent près de la frontière étasunienne. Maria est née à l’hôpital le plus proche, qui se trouvait aux États-Unis. Elle travaille maintenant en Europe pour quelques années, avec son mari qui n’est pas citoyen canadien. Si elle accouche en Europe après le 17 avril 2009, son enfant ne sera pas citoyen canadien. Si elle souhaite retourner au Canada avec son enfant, elle devra le parrainer en tant qu’immigrant de la catégorie du regroupement familial.
  • Paul est né à l’étranger de parents canadiens qui travaillaient pour une ONG humanitaire internationale. Paul a grandi au Canada mais, jeune adulte, a décidé de suivre l’exemple de ses parents en faisant du bénévolat outre-mer. Il a rencontré une réfugiée à l’étranger; leur enfant doit naître en mai. Cet enfant ne sera pas un citoyen canadien et pourrait être apatride, parce que le pays d’origine de sa mère ne la reconnaît plus comme citoyenne et que le pays où ils vivent n’accorde pas la citoyenneté à la naissance.
  • Lian a été adoptée à l’étranger par ses parents canadiens en 2008. Elle a obtenu la citoyenneté par le nouveau procédé d’attribution directe créé en 2007. En grandissant, ses parents feront tout pour qu’elle se sente pleinement acceptée comme citoyenne canadienne, tout en l’avertissant des risques d’accoucher à l’étranger parce qu’elle a une citoyenneté de seconde classe.

Déterminez si vous êtes un citoyen de première ou de seconde classe. Faites de même pour vos enfants. Tenez ensuite compte des conséquences.

Si vous êtes un citoyen de seconde classe : Si vous êtes un citoyen de première classe :
Réfléchissez bien avant d’accoucher ailleurs qu’au Canada : votre enfant n’héritera pas de votre citoyenneté et pourrait être apatride. Réfléchissez bien avant d’accoucher ailleurs qu’au Canada : vos petits-enfants pourraient être apatrides.
Vous ne disposez pas de l’option d’attribution directe de la citoyenneté si vous adoptez un enfant à l’étranger. Réfléchissez bien avant de bénéficier de l’attribution directe de la citoyenneté si vous adoptez un enfant à l’étranger : vos petits-enfants pourraient être apatrides.
Vous faire transporter à l’hôpital le plus proche n’est pas une bonne idée si cela signifie que vous accoucherez aux États-Unis. Vous ferez face à beaucoup d’obstacles bureaucratiques quand vous retournerez au Canada avec votre enfant non-canadien. Réfléchissez bien avant d’être transportée à l’hôpital le plus proche pour accoucher s’il est aux États-Unis. Vos petits-enfants pourraient être apatrides.
Essayez de choisir un conjoint qui est un citoyen de première classe si vous voulez avoir des enfants. Votre conjoint pourra alors transmettre sa citoyenneté canadienne à vos enfants.

 

  • Diffuser l’information sur les modifications aussi largement que possible pour que les Canadiens soient conscients des risques et conséquences d’un accouchement à l’étranger ou d’une demande d’attribution directe de la citoyenneté pour des enfants adoptés à l’étranger.
  • Presser les députés d’amender la loi pour annuler ces modifications et s’assurer que tous les citoyens soient égaux et qu’aucun enfant de citoyens canadiens ne soit un apatride.

Q : Pourquoi le Parlement a-t-il adopté ces modifications à la Loi sur la citoyenneté?

R : Ces modifications ont été incluses dans un projet de  loi (C-37) dont l’objectif principal était de rétablir la citoyenneté de Canadiens dits « dépossédés de leur citoyenneté » (lost Canadians). Les députés et les sénateurs ont ressenti l’urgence d’adopter cette loi pour réagir aussi rapidement que possible à la situation de ces personnes. Cependant, certains parlementaires ont exprimé des craintes face aux modifications du droit de transmettre la citoyenneté.  Dans son rapport, le comité sénatorial qualifie ces modifications d’ « arbitraires et injustes ».

Il est important de souligner l’ironie de l’adoption par le Parlement d’amendements à la Loi sur la citoyenneté visant à rétablir la citoyenneté de certains Canadiens « dépossédés de leur citoyenneté », tout en créant de nouvelles catégories de Canadiens sans citoyenneté.

Q : Pourquoi ces modifications ont été faites?

R : L’objectif de ces modifications est d’empêcher la transmission de la citoyenneté de génération en génération au sein de familles installées à l’extérieur du Canada. Toutefois, ces modifications n’établissent aucune différence entre, d’un côté, une personne qui est née à l’étranger, dans un pays où elle a une citoyenneté et où sa famille est installée et, d’un autre côté,  une personne qui est née dans un autre pays mais qui a vécu la majeure partie de sa vie au Canada et n’a peut-être aucune autre citoyenneté que celle du Canada.

Q : Comment un enfant peut-il naître apatride?

R : Ces cas seront des exceptions parce que la majorité des enfants héritent de la citoyenneté d’au moins l’un de leurs parents et dans certains pays (bien qu’ils soient rares) la citoyenneté est octroyée à tout enfant né sur le territoire. D’autres pays offrent la citoyenneté aux enfants nés sur leur territoire qui, autrement, seraient apatrides.

Toutefois, les lois sur la citoyenneté sont complexes et souvent contradictoires et l’apatridie est un problème immense. Selon une estimation, il y aurait 15 millions de personnes apatrides dans le monde.  Les réfugiés sont parfois apatrides.

Si l’enfant n’a pas droit à la citoyenneté de l’un de ses parents ou à la citoyenneté du pays dans lequel il est né, l’enfant sera apatride.

Q : Qu’est-ce que la Loi sur la citoyenneté prévoit pour les enfants apatrides de citoyens canadiens?

R : La loi comporte une disposition étrange et essentiellement creuse par laquelle un enfant apatride peut obtenir la citoyenneté, mais après avoir résidé au Canada pendant trois ans. Cependant l’enfant n’a aucun droit d’entrée au Canada et, en tant qu’enfant apatride, n’a pas droit à un passeport. La manière dont l’enfant pourrait voyager pour établir sa résidence au Canada n’est donc pas claire. Même si ces obstacles sont surmontés, l’enfant demeure apatride durant au moins trois ans.

Ces dispositions reflètent les obligations minimales établies par la Convention sur la réduction des cas d’apatridie, dont le Canada est signataire. La Convention prévoit, comme premier choix, que la citoyenneté soit accordée « de plein droit, à la naissance » aux enfants de citoyens nés sur un autre territoire qui, autrement, seraient apatrides. Cependant, la loi n’adopte pas cette option privilégiée mais se conforme plutôt le plus minimalement possible aux exigences de la Convention. Cela n’est pas digne du Canada.

Dans les faits, vu l’absence de solution apportée par la Loi sur la citoyenneté, les parents d’enfants apatrides devraient vraisemblablement se tourner vers le processus d’immigration, c’est-à-dire parrainer leur enfant comme résident permanent et ensuite déposer une demande de citoyenneté pour l’enfant une fois arrivé au Canada.  Le processus d’immigration ne solutionne cependant pas le problème du voyage au Canada d’un enfant sans passeport.

Q : Pourquoi la loi n’octroie-t-elle pas au moins immédiatement la citoyenneté aux enfants de citoyens canadiens qui, autrement, seraient apatrides?

R : Il n’y a pas de réponse claire à cette question.

Informations de Citoyenneté et Immigration Canada sur les modifications :
http://www.cic.gc.ca/francais/citoyennete/regles-citoyennete.asp

Texte de la loi C-37 :
http://www2.parl.gc.ca/HousePublications/Publication.aspx?Parl=39&Ses=2&Mode=1&Pub=Bill&Doc=C-37_4&Language=F

Commentaires présentés par le Conseil canadien pour les réfugiés sur la loi C-37 :
http://ccrweb.ca/sites/ccrweb.ca/files/c-37fr.pdf

Rapport du comité sénatorial sur le projet de loi C-37 :
http://www.parl.gc.ca/39/2/parlbus/commbus/senate/Com-f/soci-F/rep-f/rep11apr08-f.htm

Dispositions réglementaires proposées, Gazette du Canada, 13 décembre 2008 (comporte un compte-rendu des conséquences des modifications) :
http://canadagazette.gc.ca/partI/2008/20081213/html/regle1-f.html

Renseignements des Nations Unies sur l’apatridie :
http://www.unhcr.fr/cgi-bin/texis/vtx/news/opendoc.htm?tbl=NEWS&page=home&id=464dca3c4

Convention sur la réduction des cas d'apatridie :
http://www.unhchr.ch/french/html/menu3/b/o_reduce_fr.htm

Février 2009


 

Notes

1. Ceci comprend les enfants étrangers adoptés qui ont immigré au Canada  et ont été naturalisés après avoir été des résidents permanents (c’était la seule possibilité avant les modifications de la Loi sur la citoyenneté en 2007).

2. Il existe une exception pour les enfants biologiques ou adoptifs d’un parent qui travaille à l’extérieur du Canada pour le gouvernement canadien, pour une province canadienne ou pour les forces armées canadiennes.