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La plupart de ces demandeurs sont des Roms, groupe minoritaire victime de harcèlement, d’attaques racistes et de discrimination sociale bien documentés. En 2008, 43% des demandeurs tchèques ont été reconnus réfugiés. Ces décisions favorables sont cohérentes avec les informations sur ce pays qui font clairement état de violations des droits humains des Roms.

Certains demandeurs roms sont refusés parce qu’on considère qu’ils fuient la discrimination et non la persécution. Il est injuste de les traiter de « faux » demandeurs simplement parce que le tort qu’ils fuient est grave mais pas assez sévère pour répondre à la définition étroite de réfugié.

« Les Roms, jadis appelés tziganes, parlent de conditions de vie qui pourraient cadrer avec l’image du Sud des États-Unis pendant la ségrégation raciale. Ils disent faire face à la menace constante d’attaques néo-nazis et de manifestations haineuses, au cours desquelles des manifestants se dirigent vers des communautés roms et les traitent de ‘parasites’ . » 3 – Peter O’Neil, Canwest News Service

Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a récemment exprimé ses préoccupations au sujet des « faux demandeurs d’asile » de la République tchèque.4  Il est inopportun que le ministre commente la question du statut de réfugié, puisque la détermination incombe à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, tribunal quasi judiciaire indépendant. Étant donné que le ministre fait des recommandations au conseil des ministres quant à la reconduite du mandat des commissaires, des commentaires de la sorte peuvent influencer les commissaires qui statuent sur des demandes tchèques, en particulier ceux dont la fin du mandat approche.

Petra (nom fictif), une femme âgée de 22 ans, a fui vers le Canada en novembre 2007, suite à une agression brutale par des skinheads qui a nécessité son hospitalisation.

En tant que Rom, Petra a subi de la discrimination et des injures pendant toute son enfance.  On l’a traitée de « noire » et de « sale gitane ».  Les enfants non-roms refusaient de s’asseoir à côté d’elle parce qu’ils craignaient attraper une « maladie gitane ».  Les enseignants ne faisaient rien pour protéger les enfants roms.  En dehors de l’école aussi, Petra et ses amis roms étaient constamment confrontés à la discrimination : par exemple, ils se faisaient renvoyer des discothèques ou des restaurants.

Un jour, Petra et une autre femme rom ont été agressées alors qu’elles rentraient du travail.  Un groupe de skinheads les ont insultées.  Ils les ont ensuite frappées, jetées par terre et leur ont donné des coups de pied jusqu’à ce qu’elles perdent conscience.  Elles se sont réveillées à l’hôpital.  Petra souffrait d’une commotion cérébrale. L’autre femme était blessée à l’utérus.  Lorsqu’elles ont signalé l’agression à la police, celle-ci a refusé d’enquêter, prétextant que les femmes roms n’étaient pas capables de fournir des descriptions suffisamment détaillées de leurs assaillants ni leurs vrais noms.

Les commentaires du ministre envoient également le mauvais message à la République tchèque, qui devrait être encouragée à agir plus fermement pour protéger les droits de ses citoyens roms, plutôt que poussée à empêcher des Roms persécutés de fuir le pays.5

« Selon le droit international, les demandes d’asile doivent être examinées individuellement. Nous ne pouvons pas dire que les Roms tchèques au Canada ont collectivement une crainte légitime de persécution, tout comme il est inopportun que des représentants du gouvernement canadien affirment qu’ils n’ont pas de crainte légitime. Nous pouvons néanmoins affirmer qu’en République tchèque, la discrimination et l’exclusion systémiques demeurent une réalité pour les Roms : ségrégation systémique des enfants roms dans les écoles et le logement, faibles taux d’achèvement des études, discrimination à l’emploi et chômage massif, entre autres. De plus, il y a eu une augmentation de la visibilité et de l’activité de groupes extrémistes, créant une menace réelle de violence contre les Roms. Enfin, il y a un manque de volonté politique à tous les niveaux en République tchèque en vue d’apporter une solution aux problèmes de discrimination et d’exclusion » – Rob Kushen, directeur général, European Roma Rights Centre

"Amnesty International continue à recevoir des rapports faisant état d’expulsions forcées, de ségrégation dans l’éducation et de violence à caractère racial visant la communauté rom en République tchèque.  Tout dernièrement, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a noté que des femmes roms ont subi des procédures de stérilisation sans leur consentement plein et éclairé : les mesures prises par le gouvernement tchèque pour empêcher cette violation ont été insuffisantes. De plus, les efforts de la communauté rom pour obtenir des réparations pour les abus subis se sont soldés par un déni de justice.

L’information documentaire provenant d’organisations de droits humains et de comités onusiens démontre clairement que les Roms en République tchèque continuent à subir de la discrimination aux mains tant des instances publiques que d’individus et qu’il y a des individus qui ont besoin de protection.

Amnesty International a noté une augmentation de l’extremisme visant les Roms de la République tchèque, et a demandé aux autorités tchèques de se conformer à leurs obligations nationales et internationales pour s’assurer que les droits des Roms soient respectés et pour faire face à la montée de l’extrémisme.

Compte tenu de la discrimination continue contre la communauté rom, Amnesty International se préoccupe grandement des propos du ministre Kenney, qui remettent en question le bien-fondé de toutes les demandes d’asile en provenance de la République tchèque.  Ces propos en essence préjugent les demandes d’asile. Ceci va à l’encontre du droit international sur les réfugiés, qui exige que chaque demande d’asile soit décidée selon ses mérites individuels.  Il est carrément inacceptable de préjuger les demandes d’asile, ou de présumer qu’une catégorie de réfugié est en soi plus méritante qu’une autre."

Gloria Nafziger, Amnesty International Canada

 

Stefan et Ivana (noms fictifs) ont fui la République tchèque avec leur jeune fille, après avoir subi des abus pendant des années parce qu’ils sont des Roms.

Stefan a été agressé à de nombreuses reprises, et a dû être hospitalisé plus d’une fois.  Sa jambe est croche parce qu’on lui a lancé une brique.  Une autre fois, il a été battu par des skinheads avec un bâton de baseball.  Il s’est réveillé à l’hôpital souffrant d’une commotion cérébrale.  Il a été agressé sous les yeux de sa fille.  Les agressions étaient souvent accompagnées d’injures racistes.  Même si Stefan les a signalés, la police n’a jamais tenté de trouver les assaillants et n’a offert aucune protection à Stefan.

Stefan avait de la difficulté à trouver du travail : les agences d’emploi refusent souvent d’embaucher des Roms.

Ivana a été stérilisée de force, sans son consentement éclairé, il y a environ cinq ans.  Elle s’était plainte d’une douleur abdominale lors d’un examen médical.  L’hôpital lui a dit qu’une chirurgie était nécessaire pour mettre fin à la douleur. Le lendemain, les médecins l’ont informée qu’on avait enlevé son utérus au cours de la chirurgie, et qu’elle ne peut plus avoir d’enfants.

Leur fille a été agressée à l’école par d’autres élèves.  L’enseignante n’a rien fait pour intervenir et les filles ont menacé de la battre encore une fois si l’occasion se présentait.

Plusieurs enfants roms, comme la fille de Stefan et Ivana et les enfants sur la photo, sont l’objet de discrimination. Photo : Wikipedia commons/Anglos

 


3  “Roma face discrimination, attacks in Czech Republic”, par Peter O’Neil, Canwest News Service, 8 mai 2009, http://tinyurl.com/obayyh

4. “Canada flooded with Czech Roma refugee claims”, par Peter O’Neil, Canwest News Service, 15 avril 2009, http://tinyurl.com/dfacyk

5. Cet argument est exposé dans une lettre envoyée au Ministre Kenney, signée par plusieurs groupes, dont l’European Roma Rights Centre, 4 mai 2009,  http://www.errc.org/db/03/D4/m000003D4.pdf (en anglais seulement)