Le 8 janvier 2009
                  L’honorable Jason Kenney, C.P.,  député
                    Ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme
                    Citoyenneté et Immigration Canada
                    Ottawa (Ontario) K1A 1L1
                  Monsieur le Ministre,
                  Je vous écris pour vous  faire part des préoccupations du Conseil canadien pour les réfugiés quant à vos  récentes déclarations publiques au sujet des opposants à la guerre des  États-Unis qui demandent l’asile au Canada.  
                  Tout d’abord, nous  apprécions que vous ayez souligné, dans une lettre adressée au journal Toronto  Sun publiée le 2 janvier 2009, que la Commission de l'immigration et du statut  de réfugié est un tribunal indépendant.
                  Puisque la CISR est  indépendante, il est très inapproprié de votre part d’exprimer votre opinion  sur la façon dont les commissaires devraient faire la détermination du statut  de réfugié. Vos déclarations donnent une forte impression d’ingérence  politique. Cette impression est renforcée par le fait que la reconduction  des mandats est faite par le Conseil des ministres : les commissaires  pourraient craindre que leur chance de voir leur mandat reconduit soit diminuée  s’ils ne suivent pas votre interprétation. Des causes aussi publicisées que  celles des opposants à la guerre comportent toujours des difficultés pour la  CISR, qui doit respecter son mandat de rendre des décisions équitables,  impartiales, sans motivation politique, et qui reposent sur la jurisprudence et  les preuves déposées.  Des déclarations publiques telles que la vôtre ne  font que rendre la tâche des commissaires plus difficile et minent le droit des  demandeurs à une décision impartiale.
                  Que les résistants à la guerre  correspondent ou non à la définition de réfugié selon la Convention, la guerre  en Irak constitue une violation du droit international et a impliqué de  nombreux cas documentés d’abus des droits de la personne. À la lumière de ces  faits, nous sommes surpris et consternés que vous ayez proféré des commentaires  désobligeants à l’endroit de ces individus, et que vous les ayez critiqué pour  le seul fait d’avoir déposé une demande d’asile. Ces personnes méritent notre  admiration pour avoir écouté leur conscience et refusé de participer à des actes  répréhensibles, même s’ils doivent en payer personnellement le prix.
                  Nous sommes aussi  scandalisés de vous entendre déclarer que les demandes présentées par les opposants  à la guerre états-uniens provoquent des retards dans le traitement des autres  demandes de statut de réfugié. Cette déclaration est peu crédible; vu le nombre  minuscule de demandes présentées au Canada par les résistants à la guerre  états-uniens, elles n’ont aucun impact significatif sur les délais auxquels  font face les demandeurs.  Par contre, comme vous le savez, le fait que  votre gouvernement n’a pas nommé suffisamment de commissaires a causé une  importante accumulation de demandes et de très longs délais de traitement pour  les réfugiés. La nomination par le Conseil des ministres d’un nombre  adéquat de commissaires pourrait réduire significativement les délais pour que  les réfugiés obtiennent justice; contrairement aux commentaires négatifs au  sujet des résistants à la guerre qui n’ont aucun impact.
                  Le Conseil canadien pour  les réfugiés soutient tous les opposants à la guerre de tout pays qui refusent  de s’engager dans un conflit armé qui est contraire au droit international  humanitaire.
                  Nous vous pressons d’autoriser  à de tels opposants à la guerre de demeurer au Canada pour des motifs d’ordre  humanitaire, s’ils font face au renvoi vers un pays où ils seraient exposés à  des peines pour avoir refusé de participer à un tel conflit armé.  Comme  vous le savez, une telle résolution serait largement appuyée par la population  canadienne, et respecterait la motion adoptée par le Parlement en juin 2008,  qui demandait l’établissement d’un programme permettant aux résistants à la  guerre de présenter des demandes de résidence permanente.
                  Je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma considération  respectueuse.
                   
                  Elizabeth McWeeny
                    Présidente