SYSTÈME DE DÉTERMINATION DU STATUT
DE RÉFUGIÉ
PRINCIPES ESSENTIELS DU CCR
PRINCIPES GÉNÉRAUX
1. L’obligation internationale de protéger les
réfugiés
En sa qualité de signataire de la Convention de 1951, relative au
statut des réfugiés, le Canada a l’obligation de protéger
ces derniers contre la persécution. La protection des réfugiés
n’est pas un acte charitable, mais une obligation prescrite par le droit
international.
2. La protection des réfugiés une fin
en soi
Le but premier du système de détermination du statut de réfugié
doit être la protection des réfugiés. Le système
doit être conçu de façon à ce que tous les réfugiés
reçoivent la protection.
3. Le respect des obligations internationales en matière
des droits humains
Le système de détermination du statut de réfugié
doit respecter pleinement les obligations internationales du Canada en matière
des droits humains.
4. La conformité avec la Charte canadienne des
droits et libertés
Toutes les personnes qui se trouvent au Canada, qu’elles aient ou non un
statut de résidence régulier, ont droit à la pleine
protection de la Charte canadienne des droits et libertés. Le
système de détermination du statut de réfugié
doit donc se conformer pleinement à la Charte.
5. Le respect de la dignité humaine
Le système de détermination du statut de réfugié
doit respecter dignité humaine intrinsèque de tous les demandeurs
d’asile, qu’une décision soit prise en faveur de leur besoin de la
protection du Canada ou non.
6. Les motifs humanitaires
Le système de détermination du statut de réfugié
doit offrir la possibilité de recours aux demandeurs d’asile qui,
même si leur situation ne correspond pas à la définition
de réfugié ou de personne à protéger, méritent
de rester au Canada, pour des motifs humanitaires ou parce que leur renvoi
serait à l’encontre des obligations internationales du Canada en matière
des droits humains.
7. Un nombre accru de personnes réinstallées
ne justifie pas la réduction des droits des demandeurs d’asile ou
la restriction d’accès
Une amélioration du programme de réinstallation ne devrait
pas se faire au prix d’une détérioration de la protection des
droits des demandeurs d’asile au Canada. Le nombre de personnes réinstallées
ne peut justifier les restrictions imposées à l’accès
à l’asile au Canada. Le Canada peut et devrait réinstaller
un plus grand nombre de réfugiés. Cependant, les demandeurs
d’asile au Canada engagent nos responsabilités internationales en
matière des droits humains, notamment l’obligation de non refoulement.
Le Canada a l’obligation de respecter les normes internationales en matière
des droits humains, notamment lorsque l’accès à l’asile est
entravé par des mesures telles que l’interception et les ententes
de tiers pays sûr. Un nombre accru de personnes réinstallées
n’affecte pas ces obligations.
8. L’efficacité est un objectif secondaire
L’efficacité des procédures sert, en général,
aussi bien les intérêts des demandeurs d’asile que ceux du gouvernement.
Les demandeurs d’asile ont droit à une audience dans un délai
raisonnable. Ce qui constitue un délai raisonnable dépend
des circonstances propres à chaque demandeur d’asile (par exemple,
si le demandeur est séparé de sa famille). L’efficacité
ne doit pas, cependant, devenir un but en soi qui prime les droits des demandeurs
d’asile.
9. La réunification familiale
Le système de détermination du statut de réfugié
doit respecter le droit des membres d’une même famille d’être
ensemble.
10. La détention, un dernier recours
Les demandeurs d’asile ne devraient pas être détenus, sauf en
dernier recours, et seulement s’il n’y a aucune solution raisonnable de remplacement.
Les demandeurs d’asile détenus doivent avoir accès au conseil
juridique et aux ressources qui les aideraient à établir leur
identité et leur demande d’asile.
11. Les enfants séparés
Des procédures spéciales devraient être mises en place
pour protéger les intérêts des enfants séparés
qui demandent l’asile.
12. La transparence
Toutes les instances gouvernementales impliquées dans le système
de détermination du statut de réfugié doivent faire
preuve de transparence. La prise de décision ne devrait pas
être entourée de secret. Le public devrait avoir accès
aux renseignements utilisés dans la prise de décisions, et
devrait être habilité à fournir au système des
données pertinentes concernant les droits de la personne.
13. L’imputabilité
Le gouvernement est responsable de l’aptitude du système à
se conformer aux principes généraux susmentionnés.
Il s’agit d’une lourde responsabilité, car la vie, la liberté
et la sécurité des demandeurs d’asile sont en jeu. Le
gouvernement doit mettre en place des mécanismes, tels que la désignation
d’un ombudsman, afin de s’assurer que le système fonctionne correctement
et afin de protéger des individus qui ont été victimes
d’erreur ou d’injuste.
ACCÈS
14. L’accès au système de détermination
du statut de réfugié
Tous ceux qui demandent l’asile au Canada ou à un point d’entrée
canadien devraient avoir accès à une audience orale.
15. Le droit à la prise en compte de tous les
motifs de protection, lors de l’examen des demandes
Tous les demandeurs d’asile ont droit à ce que leur demande soit examinée
à la lumière de tous les motifs de protection. Dans le
cas de la définition de réfugié de la Convention de
1951, les questions d’inclusion devraient être prises en considération
avant toute question d’exclusion (c’est-à-dire, le risque qui pèse
sur l’individu devrait être évalué avant d’étudier
si la personne mérite la protection). Dans le cas des autres
motifs de protection (la Convention contre la Torture et le Pacte international
relatif aux droits civils et politiques), il n’y a pas de clauses d’exclusion
et aucune ne devrait être invoquée.
16. L’accès à la protection pour les demandeurs
d’asile interceptés
Le Canada a une responsabilité envers les demandeurs d’asile qu’il
intercepte à l’extérieur du Canada. L’obligation internationale
du non refoulement exige que le Canada s’assure que les demandeurs d’asile
interceptés aient accès à la protection.
LES DÉCIDEURS
17. L’indépendance des décideurs
Les décideurs impliqués dans le processus de détermination
du statut de réfugié doivent être entièrement
indépendants, au plan tant individuel qu’institutionnel. Parmi
les critères auxquels l’on doit satisfaire, pour garantir l’indépendance
des décideurs, ces derniers devraient être nommés pour
une période limitée, par un processus non-politisé de
nomination et de reconduction, et qu’ils œuvrent dans le cadre d’un tribunal
quasi-judiciaire indépendant.
18. La qualité des décideurs
Les décideurs doivent posséder toutes les compétences
nécessaires pour procéder à la détermination
cruciale et complexe du statut de réfugié, d’une manière
sensible.
LES AUDIENCES
19. Les audiences
À moins qu’elles soient acceptées dans le cadre d’une procédure
accélérée, le sort des demandes doit être déterminé
par un décideur compétent et indépendant, lors d’une
audience orale (non une entrevue), qui offre au demandeur d’asile l’entière
possibilité de présenter sa demande, d’être représenté
par un conseiller juridique, d’entendre toute question relative à
sa demande et d’y répondre.
20. Des audiences non basée sur un processus
contradictoire
L’audience ne devrait pas être basée sur un processus contradictoire,
lorsqu’il ne s’agit pas de questions relatives à des clauses d’exclusion.
21. Des délais de préparation suffisants
Tous les demandeurs d’asile devraient avoir suffisamment de temps pour préparer
leur dossier.
22. Traiter les demandes au cas par cas
Chaque demande devrait être étudiée indépendamment
des autres. Le système ne devrait pas réduire les garanties
procédurales ni influencer les décideurs en les astreignant,
aux dépens des demandes, à une catégorisation des demandes
(par exemple, des catégories de « pays d’origine sûr »
ou de « demande manifestement non fondée ».
23. Représentation
On devrait assurer aux demandeurs d’asile une couverture d’aide juridique
adéquate. Étant donné que les demandeurs d’asile
sont parfois mal représentés par des conseillers incompétents
ou peu scrupuleux, le processus d’audience devrait, dans la mesure du possible,
éviter de pénaliser les demandeurs d’asile qui sont mal représentés.
24. La sensibilité
L’audience devrait être organisée de manière à
refléter autant de sensibilité que possible envers les différents
cas de demandeurs d’asile. On devrait notamment faire preuve de sensibilité
envers les demandeurs d’asile qui sont des femmes, des enfants, des survivants
de la torture, des aînés ou des personnes handicapées.
25. La qualité de l’interprétation
Les conclusions de l’audience dépendent de la qualité de l’interprétation.
Les interprètes devraient être responsabilisés par un
processus d’agrément, de permis d’exercer et par un code de conduite.
26. La documentation
La pertinence de la décision que doivent rendre les décideurs
dépend de l’accès qu’ils ont aux renseignements complets, exacts,
mis à jour, neutres et disponibles concernant les conditions existantes
dans les pays que les demandeurs d’asile ont fuis. Le système
doit rendre ces renseignements disponibles. Cependant, lors de la détermination
du statut de réfugié, il faut savoir trouver un équilibre
entre la volonté d’accorder sa confiance aux documents et, souvent,
l’impossibilité de vérifier les demandes individuelles.
Les commissaires devraient être encouragés à ne pas exiger
que chaque élément invoqué lors d’une demande soit justifié
par une preuve écrite.
27. La communication des documents
Toutes les informations utilisées pour la prise de décision
concernant une demande d’asile doivent être transmises au demandeur
d’asile avant la tenue de l’audience.
28. Les motifs
Les décisions doivent être motivées par écrit.
APPEL ET RÉOUVERTURE DE DOSSIER
29. Appel sur le fond
Le système de détermination du statut de réfugié
doit offrir aux demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée
un droit d’appel sur le fond. Un appel doit offrir un processus transparent
qui s’appuie sur des décideurs compétents et sensibles et sur
le principe de l’imputabilité. Le processus d’appel doit offrir
la possibilité d’une audience orale. Il doit être conçu
afin de refléter autant de sensibilité que possible aux réalités
des demandeurs d’asile. Cela revient également à prendre
en compte que le demandeur d’asile n’a pas toujours accès à
un conseiller compétent (si toutefois, il en a). Ainsi, il est
important d’établir des délais souples.
30. Réouvertures
L’instance responsable de la détermination du statut de réfugié
devrait avoir une compétence continue, allant jusqu’au moment du renvoi,
ce qui lui permettrait de rouvrir un dossier de demande d’asile, dans le
cas d’un rejet, d’un retrait, d’un désistement, d’un changement de
circonstances ou de la disponibilité de nouvelles informations.
31. Révision par les tribunaux
Les demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée,
devraient avoir accès aux tribunaux, sans être soumis à
une demande d’autorisation, pour un contrôle judiciaire de la décision.
32. Sursis de renvoi
Il devrait y avoir un sursis de renvoi en attendant la conclusion concernant
un appel ou la révision d’une décision relative au statut de
réfugié.
LA RÉFORME CONCERNANT LES RÉFUGIÉS
33. Le processus de réforme
Avant de procéder à la mise en œuvre de toute réforme
du système, le gouvernement devrait rendre public le modèle
ou les projets de modèles qui sont en cours d’étude et accorder
un délai raisonnable aux personnes intéressées d’y répondre.
34. Entretenir les points forts du système
actuel
Malgré les failles du système de détermination du statut
de réfugié qui est en place au Canada, depuis 1989, le système
a de nombreux points forts importants qui lui ont valu une renommée
internationale et qui ont bien servi de nombreux demandeurs d’asile.
Les avantages connus du système actuel ne devraient pas être
sacrifiés en faveur des bénéfices inconnus et incertains
d’un système différent.
Le 14 juillet 2004